J’ai rencontré Jürgen Stein en 2009, lors de la préparation de mon second livre sur le Costa Rica. En séjournant dans sa réserve biologique Selva Bananito, j’ai découvert son implication et j’ai parcouru avec bonheur ce paradis vert empli d’une faune protégée et de bondissantes grenouilles !
Lorsqu’en 1974, sa famille venue de Colombie, s’installa dans la région désertée de Bananito, côté Caraïbes, nul n’imaginait que ce site ferait partie quelques décennies plus tard d’une des plus belles réserves de biosphère : La Amistad, inscrite au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, la plus grande aire protégée d’Amérique Centrale. En agronome visionnaire, le patriarche Stein était alors prêt à supporter une vie rude pour réhabiliter une zone quasi inaccessible, abandonnée depuis plus de cinquante ans, à la suite de violents tremblements de terre et de terribles épidémies. Respectueux de cet environnement, il cantonna ses cultures à de petits secteurs qui avaient déjà été défrichés, et préserva intacte la majestueuse forêt primaire.
Élevés dans l’amour de la forêt, les enfants Sofia et Jürgen reprirent le flambeau et se donnèrent pour mission de protéger les forêts de Banano, Bananito et estrella bordant les rivières, et de préserver les ressources d’eau potables qu’elles fournissent aux communautés. Pour s’en donner les moyens, ils développèrent un écotourisme d’avant-garde et créèrent la réserve biologique Selva Bananito. Site rare et exceptionnel, ses 890 hectares – essentiellement de forêt primaire –, jouent un rôle capital, aussi bien pour les humains (en participant notamment à l’approvisionnement en eau potable de la ville de Límon), que pour la faune. Son réseau de cours d’eau est un havre de paix pour les ratons crabiers et autres mammifères, les batraciens et reptiles. Sa forêt si dense accueille une riche avifaune et sert d’étape aux oiseaux migrateurs.
À travers Conselvatur (« Conservation de la forêt tropicale à travers le tourisme ») et Fundación Cuencas de Límon (« Fondation des bassins de Limon »), Jürgen et Sofia développent de multiples actions de reforestation, protection et éducation, prenant un soin tout particulier à sensibiliser les populations à l’importance de l’eau et son impérative préservation, tout en participant à la création d’une zone aquifère protégée et à la mise en place de « corridors biologiques ».
Mais cette richesse naturelle fait des envieux ; Jürgen se consacre à la sauvegarder, parfois au péril de sa vie, contre les squatters, exploitants forestiers illégaux et braconniers. Même lorsqu’il s’agit de préserver l’eau, la conservation n’est pas un long fleuve tranquille… La conservation a un prix, conclut sereinement Jürgen, qui ne se résume pas à de l’argent, mais qui implique des sacrifices, des opportunités perdues, des épreuves.
