J’ai rencontré Jack Ewing en 2009, dès mon arrivée au Costa Rica, pour la préparation de mon second livre sur ce pays. J’ai été impressionnée par sa vision et son implication et j’ai séjourné plusieurs fois dans la réserve de faune sauvage qu’il a admirablement recréée.
La nature est si résistante. Si vous lui donnez sa chance, et parfois un coup de main, les jungles peuvent réapparaître là où nous avons créé des déserts, a écrit la primatologue Jane Goodall. L’Hacienda Barú, sur la côte Pacifique, en est une illustration éclatante.
Lorsque Jack Ewing et sa famille vinrent s’installer ici, en 1972, les pâturages avaient pris le pas sur la forêt, et la faune sauvage s’était éclipsée face à l’envahissement du bétail. Après quelques années d’exploitation agricole, Jack décida de redonner la part belle à la nature et laissa la jungle reprendre sa place, tout en poursuivant quelques plantations sur de petites parcelles. L’étape suivante s’enclencha au début des années 1980 avec une reforestation planifiée, adossée à un projet touristique. En peu de temps, ce projet visionnaire se concrétisa en un grand succès pour l’écologie : 330 hectares reprirent vie. Aujourd’hui, Hacienda Barú est classée réserve nationale de vie sauvage. Ses sentiers forestiers permettent aux visiteurs de découvrir une faune riche et variée qui est revenue tout naturellement y reprendre ses quartiers. Les xénarthres y ont la vie belle, tout comme les singes capucins qui ont colonisé la réserve, et les coatis omniprésents. Les batraciens s’y épanouissent et les oiseaux aquatiques viennent nicher en masse. La présence des petits félins (ocelots, margays, jaguarondis) est un signe de bon équilibre écologique. Mais la conservation nécessite une implication de chaque instant et le travail se poursuit jour après jour, notamment avec la conduite d’études scientifiques et la participation à la création de « corridors biologiques », dont le « Chemin du tapir », qui permettent de relier les espaces naturels protégés pour désenclaver les populations animales.
La vie sauvage renaissante transforme à son tour ceux qui y vivent : reconverti en écrivain, Jack le naturaliste met sa plume au service de la biodiversité et écrit les ballades de l’Hacienda. Son premier titre, Monkeys are made of chocolate, « les singes sont faits de chocolat », raconte la faune et la flore locales que Jack a découvertes au cours de ses trente années passées à côtoyer la jungle, ainsi que son amour pour toutes les formes de vie.